On m’a demandé récemment si le fait d’habiter là où j’habite – au bord de la Manche, au bord des falaises, au bord de l’horizon – avait facilité ma déconnexion des réseaux sociaux. La réponse est oui. Bien sûr. Évidemment. Il est toujours plus facile d’ouvrir sa fenêtre quand elle a vue sur mer que son écran d’ordinateur quand il est source de stress. Il est toujours plus sain de se perdre dans la nature sauvage que dans la nature humaine telle qu’elle se donne à voir sur les réseaux sociaux.
Mais la réponse est aussi non : c’est parce que j’ai quitté Paris pour cette province un peu lointaine – belle, sauvage, profonde, mais un peu lointaine – que j’ai joué le jeu des réseaux sociaux. C’était alors pour moi une nouvelle manière de retrouver des collègues à la machine à café, de papoter, de parler boulot, de mener des projets, de faire de nouvelles connaissances, de me détendre… tout en étant à 2 heures de Paris (et de toute civilisation). Mais ça, c’était avant. Avant d’avoir envie de grand air et de grand large, avant d’avoir besoin de me ressourcer, avant d’avoir besoin de me connecter autrement, avant d’avoir besoin de marcher, d’avancer, de courir, de randonner, bref, de bouger. Et c’est parce que les sentiers des falaises me tendaient les bras que j’y ai mis les pieds. C’est parce que la baie de Somme me faisait de l’oeil que j’ai commencé à jouer les exploratrices du littoral. C’est parce que j’habite une région propice aux randonnées que j’ai commencé à marcher, puis courir. De plus en plus souvent et de plus en plus longtemps, en fonction de mon besoin de sortir du grand bain numérique et de m’aérer. Donc, oui, les abords de la Manche m’ont aidée à m’éloigner des réseaux sociaux au moment où j’en ai eu besoin. Je me suis tournée vers l’extérieur parce que cet extérieur était beau, parce que les paysages alentour étaient un appeau à émotions fortes, parce que j’y ai vu la possibilité d’une échappatoire à la haute tension en ligne. Parce que mon regard sur le monde avait changé aussi. Ce qui, à mon installation, m’avait semblé rude – cette nature sauvage – et m’avait poussée à passer énormément de temps sur Internet a été ma porte de sortie vers un ailleurs respirable.
Donc, oui, le lieu d’habitation a une influence sur notre comportement, en ligne ou hors ligne. Si vous aussi ressentez le besoin de couper les ponts avec une vie numérique trop intense, appuyez-vous sur le paysage qui vous entoure. Il est votre meilleur allié pour raccrocher les baskets. Mais surtout pour les chausser.