Nouveau fond d’écran
Oh, un clavier ! Oh, un écran ! Oh, un plâtre ! Il aura donc fallu une chute et une entorse grave relou pour me clouer de nouveau durablement face à un écran. C’est dire si la fracture entre le numérique et moi était ouverte. Quatre semaines d’immobilité forcée, des séances de kiné à n’en plus finir, la remise sur pied va être longue. Et si c’était l’occasion idéale pour reprendre le chemin du blog ? Pour essayer de l’alimenter correctement, de le muscler un peu ? Je vais tenter de faire contre mauvaise fortune bon cœur, et de donner au numérique une deuxième chance. C’est compliqué pour moi de rempiler dans l’aventure du blogging, du partage d’expérience en ligne. Je vis tellement bien sans cet univers parallèle.
Pourtant, dans une vie antérieure, j’ai créé et fait vivre trois sites, autant de pages Facebook et de comptes Twitter. Ces créatures hybrides ont été mes compagnes six années durant, entre 2010 et 2016. Elles m’ont permis de faire des rencontres intéressantes, d’écrire des livres, de sillonner la France pour donner des conférences. Elles m’ont également permis d’observer le petit peuple des réseaux sociaux, de le voir croître, changer, se déformer, se durcir sous l’assaut de meutes de tous horizons, au point d’en faire des lieux plus franchement sociaux. Et de me donner envie de changer d’air, pour de bon. Je l’ai fait, au pied de la lettre. J’ai changé mon fond d’écran, j’y ai installé des vraies forêts, des vrais sentiers, des vrais galets, des vraies montagnes, des vraies vagues ; tout, sauf des pixels.
J’entends de plus en plus souvent parler de déconnexion. De plus en plus nombreux sont cellezéceux qui, comme moi, n’en peuvent plus d’être dépendants de leurs exosquelettes tactiles, vibrants et autoritaires, et veulent renouer avec une vie hors connexion, ou à tout le moins reprendre la main sur le smartphone en le tenant à bonne distance. Je me dis donc qu’au final, mon expérience de marcheuse/randonneuse/runneuse/traileuse qui a fui en courant les univers connectés, pour n’y revenir qu’à pas comptés, peut en intéresser d’autres.
Et puis il faut bien donner un sens à ma cheville tordue. Il faut bien occuper ce temps mort imprévu. Un peu comme si, finalement, tout s’imbriquait : cette entorse, c’est ma réunification personnelle, mon union sacrée à moi. Celle du mental et du physique qui, comme dans un trail, doivent s’unir pour surmonter les difficultés. Et celle, aussi, d’une nouvelle cohabitation possible avec une vie numérique, d’un retour raisonné aux clics et aux interactions. Je replonge, mais en ne gardant que ce que j’ai aimé, et que j’aime toujours, dans la vie en ligne : une certaine idée de la liberté. C’est le seul – mais important – legs de mes années hypernumérisées : cette fluidité permanente, sans barrières horaires, et cette sérendipité possible.
J’ai trouvé dans l’esprit trail en particulier, mais aussi plus généralement dans la marche ou le running, cette sensation très grisante de pouvoir partir à la découverte de nouveaux horizons très facilement. J’ai remplacé l’errance numérique par une flânerie à 9km/h, ou 6 ou plus rarement 10 : je choisis ma vitesse, je choisis mon itinéraire, je suis libre d’aller et venir. Mon bouton on / off, ce sont désormais mes baskets. Ce sont elles qui m’emmènent sur des sites connus ou inconnus, elles qui me servent de fournisseur d’accès au grand air, qui sont mon navigateur, elles qui régulent ma bande passante, elles, surtout, qui me reconnectent les pieds sur terre et me transportent loin.
Alors oui, je me suis dit que bien que récente, ma maigre expérience en trail/run – deux trails courts et deux 10 km sur route, entre juillet et septembre dernier – non seulement va m’être utile pour affronter mentalement cette période d’inactivité forcée et de douleurs à la cheville, mais sera peut-être également utile à ceux qui comme moi souhaiteraient s’éloigner des écrans. Je suis au kilomètre zéro de ma nouvelle numérique. En route pour une reconnexion durable ?
À suivre
#Trail #Sport #Hyperconnexion #Détoxnumérique