À marche forcée

À marche forcée

Quand on arrive en ville

La marche gagne du terrain. Non pas tant parce que de nouveaux sentiers voient le jour — même si c’est le cas —, mais parce que les urbains ont découvert, ou redécouvert, les vertus de la marche à l’aune de la crise sanitaire. C’est du moins ce qui ressort de l’Observatoire des mobilités émergentes, que viennent de publier les cabinets de conseil ObSoCo et Chronos. Ainsi, 27% des 4 500 Français sondés en octobre dernier ont déclaré marcher plus régulièrement (contre 6 % y ayant moins recours, soit un solde positif de + 21 %), et 11% utilisent plus souvent leur vélo (contre 5% qui s’en servent moins). C’est le grand retour de la mobilité de proximité, du « près de chez soi », du local, qui s’explique d’abord par une volonté d’échapper aux transports en commun (qui affichent un solde d’évolution négatif de – 10%) étant donné le contexte sanitaire. Pourtant, la marche, qui peut ainsi apparaître comme un second choix, contraint et forcé, pourrait devenir un mode de déplacement de premier choix dans un futur proche. Basique, écolo, saine, et idéale sur les petites distances au quotidien, elle a tout pour perdurer. L’essayer, c’est l’adopter : 8,1 sondés sur 10 sont satisfaits d’avoir opté pour ce mode de déplacement en ville (soit autant que les automobilistes, 8/10, satisfaits de leur voiture, et moins que les cyclistes, 7,7/10). Surtout, quand on demande aux urbains sondés quel mode de déplacement au quotidien ils vont privilégier dans les années à venir, la marche arrive en tête (et à pied aussi, on l’espère). 

La marche en ville revêt cependant des aspects différents : dans les grandes villes, ou dans les centres-villes, qui prévoient des zones piétonnes, ou des trottoirs relativement larges, ou des rues adaptées, faire un pas devant l’autre est presque naturel. Mais passer le périphérique relève parfois de l’exploit pour le piéton. Et passé le périphérique, sans parler de la France périphérique, l’automobile retrouve souvent tous ses droits au détriment du piéton, faute d’aménagements.
« On sous-estime la marche, mais la marche constitue l’une des briques essentielles de la ville durable et multimodale », relevait Sonia Lavadinho, chercheuse, dans une interview au Monde en 2018. Ne serait-ce déjà que parce que la marche est indispensable pour sortir du métro ou d’un parking.
Cet engouement pour la marche, déjà amorcé depuis quelques années, et qui a notamment donné naissance à un néologisme — la marchabilité, ou l’étude du potentiel piétonnier des villes, née il y a une vingtaine d’années sous l’impulsion de chercheurs américains — a été amplifié par la crise sanitaire. La ville, terrain de jeu outdoor comme les autres ?